L’escalier familial qui craque sous vos pieds, l’écho du cri des mouettes transporté par l’air marin, le son d’une pluie battante percutant une gouttière en cuivre… Certains sons ont une résonance particulière dès lors qu’ils passent par le filtre de notre mémoire et de nos émotions. Ils ont la capacité de nous transporter dans le passé, au cœur de souvenirs bien ancrés.
La mémoire sensorielle ou perceptive est comme son nom l’indique reliée à nos cinq sens. En psychologie, on dit qu’elle est composée de trois types de mémoires : la mémoire visuelle ou iconique, auditive et olfactive. Quand notre cerveau se remémore un souvenir à travers l’un de ces cinq sens, une multitude de zones de notre cerveau s’active et font appel, selon la situation et les besoins, à d’autres types de mémoires.
La mémoire sensorielle travaille donc en synergie avec la mémoire à court terme ou à long terme, la mémoire de travail, sémantique, déclarative ou encore procédurale… Chacune de ces mémoires a une fonction bien précise, comme par exemple celle de nous rappeler comment respirer ou contracter nos muscles quand nous avons peur pour la mémoire procédurale. Ou de nous remémorer que New York est la capitale des États-Unis pour la mémoire déclarative (mais non, votre mémoire déclarative sait bien que c’est Washington !).
Mais alors pourquoi certains sons nous transportent-ils parfois si violemment et soudainement à des souvenirs très précis, en apparence parfois si dérisoires ? Comment notre cerveau fait-il la sélection entre les perceptions auditives marquantes ou insignifiantes ? L’une des réponses que l’on pourrait apporter à ces questions est le rôle des émotions ! Nos émotions ont un rôle prépondérant dans notre mémoire épisodique.
La mémoire épisodique ou autobiographique, c’est celle qui nous permet de nous souvenir d'événements biographiques passés et à venir. Dans cette mémoire épisodique, en plus des détails factuels du goûter que vous préparait votre grand-mère, est stocké l’état émotionnel dans lequel vous étiez, ce que vous avez ressenti en le mangeant. L’une des particularités de cette mémoire est qu’elle s’impose à nous : nous ne cherchons pas de façon active à la mobiliser. Les souvenirs sensoriels que nous associons et des événements constitutifs de notre vécu du monde et de notre personnalité sont donc régulièrement ramenés à nous à l’insu de notre plein gré à travers nos sens... notamment notre audition !
Peut-être avez-vous déjà lu ou entendu que certaines personnes seraient plus à même de solliciter leur mémoire auditive, visuelle ou kinesthésique (liée au toucher). Chacun d’entre nous aurait donc un style d’apprentissage lié à ses sens. Et bien sachez que cette théorie est fausse et n’a aucun fondement scientifique : il s’agit d’un neuromythe ! Aucune étude scientifique n’a à ce jour prouvé l’hypothèse selon laquelle nous aurions un style d’apprentissage lié à un style de mémoire sensorielle prédominant.
Pour chacun d’entre nous, l’audition est primordiale dans la construction des émotions, des souvenirs et de la mémoire, et de ce fait, la perte d’audition augmente nettement les risques de développer une maladie de la mémoire comme Alzheimer, par exemple. Raison de plus pour prendre soin de nos oreilles comme de la prunelle de nos yeux !
