Fermez les yeux et imaginez le bruit des vagues qui se cassent sur des rochers. Celui d’une feuille de papier bulles qu’on fait éclater. Il est probable que votre perception s’accompagne de quelques émotions et sensations. Quelle est la part de subjectivité dans ce que vous percevez de ces sons ? Est-ce que vos proches s’en font la même représentation ? Et si tout ceci n’était qu’une question… de cerveau ?
Le système auditif de l’être humain est un organe très sensible et très fragile à la mécanique bien huilée. Il nous permet de percevoir et de traduire en ce que l’on appelle “son” des vibrations qui se transportent dans la matière principale dans laquelle nous évoluons : l’air. Une fois qu’une vibration entre en contact avec notre oreille, elle fait vibrer le tympan qui la transmet aux plus petits os de notre corps : les osselets. Le rôle de ce marteau, cette enclume et cet étrier est d’amplifier mécaniquement les vibrations pour les transmettre à la cochlée située dans notre oreille interne. A ce stade, la vibration est convertie par la cochlée en signal électrique transmit à notre cerveau via le nerf auditif : c’est seulement là que nous pouvons parler d’un “son”, qui n’est qu’une perception, par notre cerveau, d’une vibration.
Quand on parle de son, il faut distinguer deux types de perceptions principales : l’intensité (qui se mesure en décibels) et la fréquence (qui se mesure en Hertz). Une oreille humaine en bonne santé est capable de percevoir les sons allant de 20 à 200 000 Hz compris entre 0 et 120 dB et de distinguer environ 400 000 sons différents. Contrairement à certains animaux, nous ne sommes donc pas à même de percevoir les ultrasons et les infrasons. Pour les personnes atteintes d’une baisse d’audition qui ne perçoivent pas les sons par leur appareil auditif, la capacité à ressentir les vibrations à travers tout le corps est souvent décuplée. Imaginez le compositeur Beethoven atteint de surdité précoce, assis par terre devant son piano sans pied posé au sol pour capter les vibrations de mélodies par le sol.
Si à son origine un son est la vibration tangible et réelle provoquée par le mouvement d’un objet ou un être vivant, notre perception n’en est qu’une interprétation par notre cerveau qui s’évertue continuellement à expliquer chacune de nos perceptions sensorielles. Si notre vue ne nous permet qu’une perception du monde à 180°, l’ouïe, elle, est à 360°. Elle a donc été notre sens le plus utile pour nous prévenir du danger, aussi loin que nous emmènent nos origines. Tout au long de l’évolution de l’espèce humaine, nous avons donc intégré, appris, assimilé le fonctionnement du monde et ses sons, afin de déduire en un temps record l’origine d’un son quand il nous parvient. Notre cerveau, cet ordinateur ultra performant, nous permet donc d’évoluer en parfaite cohérence et sécurité avec notre environnement, sauf pour les personnes atteintes de certains troubles comme la misophonie par exemple.
Ensuite, il s’agit d’un cocktail justement dosé entre la sensibilité et l’expérience du monde de tout un chacun, qui ne peut être qu’unique par définition. Ajoutez à cela le contexte dans lequel chaque son est entendu et vous touchez du doigt la multiplicité de perceptions possibles d’un même son. Une fois la donnée “son” traitée, elle peut être traduite par une émotion positive ou négative, ce qui en changera la perception d’un individu à un autre. Du papier bulle qui éclate ? Le bruit d’un sèche-cheveux ? Le son d’un caillou qu’on jette à la surface de l’eau ? Qui sait comment vos proches écoutent, entendent et ressentent ces différents sons qui vous semblent si banals et universels ?
