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À quoi ressemblait l'environnement sonore du passé ?

Publié le 4 septembre 2023

Fermez les yeux. Imaginez-vous au tout début du XIXème siècle, à l’exact même endroit où vous vous trouvez. Qu’imaginez-vous en premier ? L’image des vêtements que vous porteriez ou de ce que vous verriez à travers la fenêtre ? Et qu’en est-il des sons ? Entre fantasme et réalité, à quoi ressemblait l’environnement sonore du passé ?

Le son, ce grand oublié des cours d’Histoire

Depuis tout petits, nous apprenons l’Histoire. Nous voyons des tableaux, des reconstitutions, des vestiges archéologiques dans les musées. Nous lisons les descriptions d’évènements et de lieux anciens à travers des livres, des papiers administratifs ou des courriers écrits par celles et ceux qui nous ont précédés. Nous foulons les vieilles pierres de monuments centenaires et nous imprégnons de leurs espaces. Grâce au merveilleux travail des historiens, peintres, écrivains, archéologues… nous arrivons assez bien à nous représenter l’environnement visuel depuis la préhistoire jusqu’à aujourd’hui. Le 6 décembre 1877, Thomas Edison effectue le tout premier enregistrement sonore avec un objet de son invention : le phonographe. Mais avant cette date, c’est le silence complet. Pourtant l’environnement sonore en dit énormément sur le mode de vie, de communication, le savoir-faire et le quotidien de notre société. C’est là qu’intervient Mylène Pardoen, archéologue du paysage sonore.

Reconstituer les paysages sonores du passé

En tant qu’archéologue du paysage sonore – fonction qu’elle a elle-même créée – le rôle de Mylène Pardoen est de construire des fresques sonores pour apporter une nouvelle dimension aux reconstitutions historiques. En ajoutant la perception sonore à la simple perception visuelle, selon elle, on ajoute des émotions. Dans l’épisode 1 de « Archéologie sonore, écouter les sons du passé » de Radio France, elle dit : « Quand on remonte le temps pour essayer de reconstruire des ambiances sonores, on est obligé de faire une sorte de millefeuilles parce qu’il y a ce qu’on appelle la géophonie (ce qui est attenant au lieu), la biophonie (les poules, les dindons, les oiseaux, les chiens). Au-dessus, il y a les plus gros pollueurs, nous, avec l’anthrophonie. […] C’est une articulation complète de tout ce qui peut se passe à un moment donné, dans un espace donné. » En tant qu’enquêtrice du son, la chercheuse part donc en quête de sons d’antan qui existent encore dans notre présent et tente, avec pour appui les écrits des historiens et les vestiges archéologiques, de les réenregistrer le plus fidèlement possible.

Dans son projet « Bretez », - nom du cartographe qui a réalisé le plan de Paris à l’époque de Turgot - Mylène Pardoen a reconstitué l’environnement sonore du quartier du Grand Châtelet à Paris au XVIIIème siècle. Pendant environ 8 minutes et 30 secondes de sons, nous marchons entre le pont au Change et le pont Notre-Dame, quartier qui « concentre 80 % des ambiances sonores du Paris de l’époque » explique la musicologue au journal du CNRS. Dans des rues beaucoup plus étroites qu’aujourd’hui et arpentées par des artisans aux métiers oubliés, avec des revêtements et matériaux différents qui donnent des échos sonores bien particuliers et des animaux pullulant à chaque coin de rue… on se plonge dans la cacophonie de notre ancienne capitale. Pour reconstituer le son d’artisans comme les forgerons, les tailleurs de pierre ou encore les charpentiers, Mylène Pardoen s’est notamment rendue sur le chantier médiéval de Guédelon, dans l’Yonne, où des artisans construisent un château fort du XIIIème siècle avec les méthodes et outils de l’époque. Cette reconstitution sonore est disponible gratuitement sur YouTube !

Paysage sonore du passé, entre perception et réalité

Si nous avions des enregistrements sonores originaux de lieux de vie du XVIème, ou XVIIème siècle, pensez-vous que nous entendrions pour autant exactement la même chose que les contemporains de l’époque ? C’est là toute la subtilité de nos perceptions sensorielles et particulièrement auditives, car au-delà de l’onde sonore en tant que telle, une fois traitée par notre cerveau, ce dernier va le rattacher à des référentiels, des symboles et des émotions qui sont belles et bien ancrées dans notre temps. Que ce soit un cheval, un instrument de musique ou le son de couverts qui se heurtent à une assiette… nous n’entendons pas ces sons de la même manière que nos ancêtres !

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